Unpopular Opinion : Rudi Garcia est le meilleur entraîneur français
Par Matthieu Agro
Taxé de paria par les Olympiens, critiqué pour son management, Rudi Garcia a pourtant toujours prouvé, partout où il est passé, qu'il avait la carrure d'un grand entraîneur. Incontestablement, il est aujourd'hui l'un des meilleurs techniciens européens.
Les "Unpopular Opinion". Ces avis clivants, que l'on garde souvent pour soi par peur de subir les foudres de la majorité bien pensante. Pour autant, ces opinions ont le mérite d'exister et sont même essentielles afin de faire évoluer les débats. Au cours de cette nouvelle série, pas de propos aseptisés ou édulcorés, mais une bonne dose de franchise propre à l'essence de 90min : donner la parole aux supporters.
De fil en aiguille, Rudi Garcia est devenu l'une des personnalités du football français les plus detestées dans l'Hexagone. Son passage, il y a un an et demi, de l'Olympique de Marseille au rival lyonnais n'y est sans doute pas étranger.
Plus encore, on relève une fâcheuse tendance de la part des 'haters' de Garcia : beaucoup ont la mémoire courte. Lorsqu'il a fallu tirer, en 2019, son bilan à l'OM, quasiment personne n'a mentionné que ce dernier a emmené le petit effectif phocéen en finale de la C3 en 2018, dédouanant ainsi les principaux succès de R.G. à la tête du club.
Seul est apparu évident de mettre en exergue la décevante cinquième place de Marseille en Ligue 1 la saison suivante, les privant de C1 pour une septième saison consécutive. Pas vraiment une surprise, lorsque l'on voit les prestations confuses de ses cadres durant cet exercice 2018-2019, et une infirmerie toujours au complet.
Avec Garcia, la mémoire collective est souvent injuste : on ne retient souvent de lui que le mauvais, à défaut du bon. Est-ce là le symbole parfait de la mentalité française ? Peut-être bien. Mais Rudi Garcia a pourtant des arguments à faire valoir concernant son bilan d'entraîneur. Un bilan qui, quoi qu'on en dise, demeure très positif.
1. Il a su transformer Lille et Rome en machines à gagner
En seulement deux saisons, Rudi Garcia a fait évoluer le LOSC d'équipe visant la première partie du tableau de Ligue 1 au club français le plus performant.
En faisant éclore une génération prometteuse (Hazard, Debuchy, Cabaye, Sow, Gervinho), le coach nordiste, qui avait déjà pris l'habitude d'amener ses anciens clubs vers les sommets, (sous sa tutelle, Dijon a fait une montée historique en L2 en 2003 et le Mans réalise sa meilleure place en L1 en 2008, neuvième) fait totalement exploser le potentiel des Dogues.
Lille finit champion en 2011, et se qualifie ensuite deux années consécutives en C1, compétition à laquelle elle est peu habituée. Si son bilan à la tête du LOSC est plus que positif, son épisode en Italie avec Rome, entre 2013 et 2016, est une véritable révélation. En Italie, Garcia a su adapter son style offensif à une équipe qui paraissait en perdition.
Lors de sa première saison, il réussit le meilleur départ de l'histoire de la Serie A : l'AS Rome remporte 10 matchs en 10 journées. Avec le tricolore, Rome, vice champion d'Italie 2014 et 2015, se qualifie deux années de suite en C1 après plusieurs années sans Coupe d'Europe.
2. Audacieux, il propose un jeu attractif
Contrairement aux idées reçues, le plan de jeu de Rudi Garcia, quelle que soit la qualité d'effectif dont il dispose, est résolument offensif. Le coach olympien s'appuie (presque) toujours sur un 4-3-3 en pointe haute, avec un milieu de terrain offensif qui dicte le jeu.
"J'ai toujours pensé qu'en jouant bien, on avait plus de chances de gagner beaucoup de matchs, plutôt qu'en se concentrant uniquement sur le résultat."
- Rudi Garcia.
En Ligue 1, le LOSC champion de France 2011, avait à l'époque battu des records offensifs, et cette année encore, Lyon fait presque jeu égal avec l'attaque de feu parisienne (40 buts contre 37 inscrits en 18 journées). Oui, si Rudi Garcia est parfois obligé de défendre, comme face aux grosses écuries en C1, son identité tactique reste un jeu résolument porté par l'avant, qui est exportable dans tout championnat.
3. Il sait exploiter au maximum le potentiel de ses joueurs
Quels sont les points communs entre Bouna Sarr et Maxwell Cornet ? Les deux (le premier à l'OM, le second à l'OL) ont évolué sous les ordres de Rudi Garcia. Sous sa tutelle, ils ont eu chacun une progression constante, livrant des prestations majuscules notamment à l'heure des grandes joutes européennes. Et Garcia n'est pas étranger à leur évolution.
Pour les deux, ailiers de formation, le tacticien a opté pour leur repositionnement un cran plus bas, au poste de latéral. Aujourd'hui, Bouna Sarr a posé ses valises chez les champions d'Europe munichois, et Cornet continue de performer sous les ordres de Garcia. Ce dernier sait aussi bien faire évoluer les joueurs confirmés que les jeunes pousses. Hazard, Cabaye, Ljajic, Ocampos : Garcia accorde sa confiance aux espoirs, et les transcende.
4. C'est un homme d'exploits
Avec lui, Lyon obtient ses meilleurs résultats depuis plus d'une décennie, et la fin du règne des Gones. Malgré un effectif pourtant pas digne des plus grands clubs européens, l'entraîneur de 56 ans a su hisser son équipe juqu'en demi-finale de la dernière Ligue des Champions, éliminant tour à tour la Juve et Manchester City.
Rudi Garcia n'en est pas à son premier exploit continental. Aurait-on parié sur une telle épopée marseillaise en 2018, avec un Mandanda diminué et un tableau très dense en C3 ? Si Lyon est aujourd'hui 1er de Ligue 1, il le doit avant tout à ses joueurs. Des pions qui respectent la patte Garcia. Un football léché, généreux et offensif. Certes l'homme, magnifique tacticien, n'est peut-être pas le meilleur communiquant dans son management.
Mais l'étiquette que l'on prête à R.G est résolument erronée. Il faut que cela cesse. Qui aujourd'hui, avec d'aussi petits moyens que ses écuries, a déployé d'aussi étonnants résultats ? En France, absolument personne. Rudi Garcia est le meilleur entraîneur tricolore de la décennie.